NEWS de l'ATELIER DES DIALOGUES
Montréal "Sous la peau de l'autre"
En novembre 2016, j’étais à Montréal en compagnie d’Anne-Laure Lemaire et de Laurence de Sève, dont certains d’entre vous ont vu INCORPOEM en octobre 2018. Nous avions été accueillies en résidence au Studio d’Elan d’Amérique tout près d’Ubisoft Montréal sur le Boulevard Saint Laurent à la lisière du Mile End. Les deux co-directrices du studio, Camille et Catherine, furent aussi nos co-performeuses pour cette expérience québecoise autour du personnage de Jeanne Mance, française, co-fondatrice de Montréal, autour des questions de la colonisation, du soin, des traversées… Camille Renarhd est Franco-Canadienne, danseuse, performeuse en thèse à Edmonton en Alberta. Catherine Cédilot est performeuse, clown et comédienne québecoise, formée entre autres à New-York, Toronto, en Belgique et en Suède.
Presque trois ans plus tard, en avril 2019, j’ai eu la chance de retrouver Camille et Catherine à Montréal. Au département de danse de l’UQAM (Université du Québec à Montréal), Camille m’a invitée à un dialogue entre Linda Rabin, enseignante du Continuum (créé par Emilie Conrad), et Aurélie Pédron, créatrice de performances intégrant le spectateur.
Vous trouverez ci-après des liens vers des sites vous permettant d’élargir la découverte.
Je me suis trouvée dans un cercle de danseuses et danseurs engagés dans le « soma », le corps non pas comme instrument mais comme mouvement, comme intériorité d’être. Linda exprime :
« - la vie, c’est le mouvement
- se brancher dans ce corps que nous sommes
- voir le corps de l’autre et voir le courant qui en dévie, et aider à le reconnecter ».
Ces déclarations peuvent sembler simples voire banales. Elles sont épreuves de vie. A titre d’exemple Linda, alors que sa vie était la danse (Julliard School New York), découvre en Israël l’approche Alexander (technique de soin posturale). Ce sera le point de bascule de sa transformation, un changement de sa vision de sa perception de l’autre par l’intérieur. Elle décide de ne plus danser, pour peu à peu, dans son cheminement (deux ans de tâtonnement, d’apprentissage du neuf), saisir qu’il s’agissait pour elle non pas de ne plus danser mais de danser autrement, dans une conscience corporelle, dans le déploiement du mouvement intérieur/extérieur.
Aurélie (qui a été l’élève de Linda) a partagé le parcours du projet INDEEP (ateliers sur un an suivis d'une performance). Sa question de départ avait été : quelles sont les personnes qui auraient besoin d’être bien avec leur corps et qui n’ont pas de moyen, ni de chemin pour y avoir accès. Une rencontre avec des jeunes de rue lui donne la réponse. Elle trouve alors des financements pour ouvrir des ateliers de recherche pendant un an, au bout duquel est présenté par les participants aux ateliers une performance qui dure 10h00. Son pari ? Ne rien attendre d’eux de l’ordre du faire : « ne plus se droguer, ne plus se prostituer, chercher un logement, aller à l’école, trouver du travail ». « Ils n’avaient rien à montrer, mais à être ». On peut difficilement faire plus exigeant, mais aussi plus libérateur. Aurélie a bâti avec eux une œuvre rituelle, donc de transformation. À la fin, le retour des jeunes performeurs a été : « c’est un trip de drogue sans drogue – un retour vers des souvenirs d’enfance, des odeurs ». Les répercussions ont été fortes ; certains ont repris le chemin de l’école, d’autres celui du travail. Ceux qui ne pouvaient plus sentir leur corps (comme dans d’autres approches, on parle d’être coupé de ses émotions) avaient vécu la révélation de leur être par la reconnaissance de l’éprouvé du corps.
Par ailleurs, j’ai assisté/participé à la conférence-démonstration de la maîtrise de Catherine Cédilot (Ecole Supérieure de Théâtre) au studio d’Essai Claude Gavreau.
Catherine a travaillé avec six artistes pour éprouver son hypothèse : croiser deux exercices (l'un de la méthode Meisner et l'autre de celle de Pochinko) de lâcher-prise-découverte de soi pour littéralement se mettre sous la peau de quelqu’un.
Je fais un focus sur la méthode Meisner qui consiste (dans la pratique de Catherine Cédilot) à un face-à-face, un ping-pong d’une résonance émotionnelle qui n’est pas un miroir. Un « tu-je » répété d’une information factuelle (« tu portes une barbe, je porte une barbe » qui glisse vers « tu souris... ») puis d’un élément émotionnel partant du corps (« tu souris, je souris » qui glisse sans manipuler à « tu es content... ») à une interprétation émotionnelle (« tu es fier, je suis fier » qui glisse sans jugement à « tu es fatigué, je suis fatigué »). Le principe de la répétition provoque un lâcher prise incroyable, et le glissement d’un état à un autre se dit/se rend visible avec une justesse extraordinaire. Un vrai entraînement au ressenti, à l’observation (sans détachement), à être là, présent à l’autre, sans le devancer, ni l’hypnotiser : avec lui.
Catherine Cédilot, lors de son laboratoire, a dégagé des mécanismes de défense à être avec l’autre qui ne manqueront pas de nous parler :
- observation ou siège arrière
- constatation
- balayage ou déviation
- question
- indifférence ou cynisme
- identification à l’émotion
- mensonge ou ironie
- gêne, rire, surprise
- hypnotisme
- arranger les choses
- bon élève
- analyse
Intéressant, n’est-ce pas ?
Élargir votre découverte :
Camille Renarhd
Dialogue Linda Rabin Aurélie Pédron
Linda Rabin
Aurélie Pédron
Catherine Cédilot
Technique Sanford Meisner
Approche Pochinko
Bien à vous
Catherine Redelsperger
L’ATELIER DES DIALOGUES est une invitation à préparer des protocoles de conversation laissant « du temps » pour que la rencontre et la confiance puissent naître.